JURISPRUDENCE : Calcul de la participation – portée de la règle de non-remise en cause du bénéfice net certifié – conformité à la Constitution
A l’occasion d’un litige sur la participation, l’interdiction légale de remettre en cause le bénéfice net certifié par une attestation du commissaire aux comptes ou de l’inspecteur des impôts méconnait‑elle le droit à un recours juridictionnel effectif, protégé par la Constitution ?
Sur la base d’un recours intenté par des syndicats et des CSE, la Cour de cassation a transmis au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la conformité de cette interdiction à la Constitution. Les requérants estiment qu’elle prive les salariés de toute possibilité de contester le calcul de la réserve spéciale de participation, y compris lorsque la fraude ou l’abus de droit sont invoqués à l’encontre d’actes de gestion;
Règle applicable : Le bénéfice net constitue l’élément essentiel de la formule de calcul de droit commun de la réserve spéciale de participation aux résultats de l’entreprise (C. trav. art. L. 3324-1). Ce montant, certifié par une attestation du commissaire aux comptes ou de l’inspecteur des impôts, ne peut être remis en cause à l’occasion d’un litige relatif à la participation aux résultats de l’entreprise (C. trav. art. L. 3326-1). Pour la Cour de cassation, cette règle d’ordre public s’applique y compris en cas de fraude ou d’abus de droit dans les actes de gestion de l’entreprise (Cass. soc., 28 février 2018, n° 16-50.015).
- Le Conseil Constitutionnel juge dans cette décision que l’interdiction légale de contester le montant du bénéfice net ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit à un recours effectif devant le juge dès lors que :
- cette disposition légale poursuit un objectif d’intérêt général, destiné à éviter que « les montants déclarés par l’entreprise et vérifiés par l’administration fiscale, sous le contrôle du juge de l’impôt, puissent être remis en cause, devant le juge de la participation, par des tiers à la procédure d’établissement de l’impôt »;
- l’administration fiscale, qui contrôle les déclarations fiscales, peut, le cas échéant sur la base de renseignements portés à sa connaissance par un tiers, contester et faire rectifier les montants déclarés par l’entreprise au titre du bénéfice net ou des capitaux propres, notamment en cas de fraude ou d’abus de droit liés à des actes de gestion.
Ainsi, seul un redressement prononcé par l’administration fiscale peut conduire à un nouveau calcul de la réserve spéciale de participation, basé sur des montants révisés (C. trav. art. D. 3324-40), si une attestation rectificative, établie dans les mêmes conditions que l’attestation initiale, est produite (C. trav. art. D. 3325-4).