JURISPRUDENCE : Expertise pour risque grave – Audition des salariés – Absence d’accord préalable de l’employeur
Un expert désigné dans le cadre d’une expertise pour risque grave peut-il procéder à l’audition des salariés, sans l’accord de l’employeur ?
Règle applicable : le CSE peut nommer un expert agréé, lorsqu’un risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un accident du travail, une maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l’établissement (C. trav. art. L. 2315-94, 1°). L’expert a libre accès dans l’entreprise (C. trav., art. L. 2315-82) et l’employeur doit fournir à l’expert les informations nécessaires à l’exercice de sa mission (C. trav. art. L. 2315-83). S’agissant de l’audition des salariés, en l’absence de précision dans les textes, l’expert-comptable désigné par le CSE dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, peut procéder à l’audition des salariés à la condition d’obtenir l’accord exprès de l’employeur et des salariés concernés (Cass. soc., 28 juin 2023, n° 22-10.293).
La Cour de cassation adopte une règle différente lorsque l’expert intervient dans le cadre d’une expertise pour risque grave. L’expert peut auditionner certains salariés s’il estime que leur audition est utile à l’accomplissement de sa mission, à condition d’obtenir l’accord exprès des salariés concernés, mais sans que l’accord de l’employeur soit requis. En cas de contestation, le juge appréciera la nécessité des auditions prévues par l’expert au regard de sa mission.
A l’appui de sa décision, la Cour de cassation rappelle que l’employeur, tenu à une obligation de sécurité à l’égard des salariés, doit mettre en œuvre des mesures de prévention des risques professionnels (C. trav. art. L. 4121-1 et L. 4121-2) et que les représentants du personnel contribuent à la promotion de la prévention des risques professionnels (C. trav. art. L. 2312-5). La solution ici retenue en considération de l’obligation de prévention des risques de l’employeur ne devrait pas être étendue à tous les cas de recours à l’expertise par le CSE.
Cass. soc., 10 juillet 2024, n° 22-21.082